DES VACANCES DE REVE
Depuis trois jours déjà, Luna n'avait pas mis le nez dehors. Elle cuvait son chagrin comme un lendemain de cuite, à moitié consciente de ce qui lui arrivait, fuyant la réalité alors que tout la ramenait à elle.
Les objets sont parfois bien sadiques et on aurait envie de tous les casser, lorsqu'ils ne cessent de nous rappeler les moments heureux à jamais disparus.
Comme une énorme larve sous sa couette, elle semblait ramper de la chambre à la cuisine, de la cuisine à la salle de bain, de la salle de bain au canapé. Se dandinant lourdement d'un pied sur l'autre afin d'assouvir les besoins nécessaire à sa survie, elle évitait les miroirs, la balance et les magasines féminins qui semblaient lui crier " Tu es grosse, une loque humaine, regarde toi et frémit !"
C'était justement ce qu'elle ne voulait pas faire, se regarder. Et en fait, elle n'avait pas besoin de ça pour frémir.
La raison de l'état pitoyable dans lequel elle se trouvait? Un homme bien sûr. Pas n'importe quel homme pourtant...
Il y avait encore deux semaines, elle préparait sa valise pour ce qui devait être le plus beau voyage de sa vie. Une escapade en amoureux, sur les terres d'Ulysse, de la féta et du sirtaki, juste tous les deux, au paradis!
Depuis des mois, ils n'arrivaient pas à trouver des moments vraiment seuls tous les deux.
Leur quotidien était comme une prison, à laquelle ils ne pouvaient échapper et qui les empêchaient de vivre pleinement leur amour.
Enfin, pendant tout une semaine, rien d'autre ne compterait, ils seraient le centre de leur monde, l'unique chose importante.
Ils comptaient les jours et espéraient ainsi accélérer le sablier du temps.
Pourtant, il aurait fallu l'arrêter afin d'éviter ce qui allait certainement être la cause du cauchemar qui se profilait.
Ils se disputèrent. Une violente dispute qui laisse un poids sur le coeur, un gout d'amertume dans la bouche et jette un froid entre deux êtres bouillonnants.
Elle essaya de rattraper la situation et s'agrippa comme une folle à ce qui restait entre eux.
A présent elle redoutait ce départ tant attendu.
Il avait commencé à la matraiter, ne répondant plus à ses appels et se comportant comme un goujat de bas étage. Il avait adopté avec elle des manières de rustre et commençait à montrer une facette inconnue de lui même. Docteur Jeckyl laissait sortir Mister Hide.
Malgré tous ses efforts pour garder la situation sous contrôle, elle sentait la souffrance monter dans son ventre et gardant son calme en apparence, elle essayait de lui faire comprendre qu'elle ne méritait vraiment pas un tel traitement.
Elle se sentait coupable et minable. Il la faisait se sentir comme une moins que rien, capable à elle seule de gâcher une relation qui semblait si prometteuse. A cause de son caractère, elle avait tout brisé et il le lui faisait payer.
Une lueur étincelait dans ces yeux. La jouissance. Le plaisirs de faire du mal à quelqu'un qu'on sent sous sa coupe. L'impression grisante de contrôler un être et de l'avoir a sa merci. Il semblait adorer lui faire du mal et effectivement, il n'allait pas s'arrêter là.
La vieille de leur départ il ne lui répondit pas au téléphone la laissant dans le doute du lendemain. Elle était totalement dépendante de lui, car il s'était occupé de tous les détails techniques, billets d'avion, hôtel et transport jusqu'à l'aéroport.
Quelques heures seulement avant l'heure du vol, il débarqua sans prévenir. Il la trouva en larmes, épuisée et tremblante. Elle n'eut pas le coeur ni la force de le jeter dehors et se contenta de se taire. Cette nuit là, il la serra contre lui essayant d apaiser son âme blessée et fit renaître l'espoir dans son coeur.
Pendant le voyage, il ne lui adressa pas la parole. Il fallait pourtant qu'ils discutent, qu'ils règlent leur problème. Il ne voulait pas, ne la laissant pas parler lui disant qu'ils s'expliqueraient quand ils seront arrivés et reposés. Profitant de son pouvoir, il la manipulait, jouant avec elle comme une poupée brisée et cabossée.
Pendant plus de vingt quatre heures elle vécu l'enfer du silence. La présence pesante de l'autre dans un froid glacial et une incertitude terrifiante. L'attente, l interminable attente de celle qui se sait condamnée et qui attend la sentence.
Elle se sentait gênée en permanence, elle étouffait et les larmes coulaient de ses yeux sans qu'elle puisse les contrôler. Le spectacle terrifiant de tous ces couples heureux de profiter de leur vacance. Et eux, dans le desespoir d'avoir à jouer cette mascarade.
Il lui dit qu'il voulait arrêter. Que tout était finit.
Il avait attendu d'être à des milliers de kilomètres pour lui dire.
Comme un feu d'artifice couronnant cette relation désastreuse, il avait fini en beauté.
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